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Séville - Interview extraite du DVD à paraître

La Force créatrice de la Voix. Retranscription de l'interview consacrée au travail d'In-Vocazione* de Séville, à paraître sur le prochain DVD. Propos recueillis par Andrea Marabini.

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Pierre-Olivier Bannwarth :

« - Avant de parler de l'improvisation, j'ai envie de parler du chant ; et je me rappelais ce matin qu'en Australie

il existe une tribu aborigène qui - depuis des centaines - peut-être même des milliers d'années - chante et danse à chaque instant.

C'est-à-dire qu'une partie de la tribu se relais sans cesse,

car, sans arrêt, sans interruption, l'être humain doit chanter et danser. Parce qu'on croit que si, un jour, cette tribu s'arrêtait de chanter et de danser, ce serait la fin du monde.

Alors pour nous, ici en Occident, ce genre de croyance fait sourire,

mais il n'empêche que ça fait des milliers d'années que ces gens-là chantent et dansent,

et peut-être que si la fin du monde n'arrive pas

c'est parce que ces gens chantent et dansent toujours...

Moi il me plaît de croire à ce genre d'histoires,

aussi parce qu'indépendamment de cette question de la fin du monde,

je crois que ces gens permettent à une certaine qualité humaine de perdurer dans le coeur de l'homme,

que quelque chose, sans cesse, est nourri sur la planète grâce à leurs danses et à leurs chants.

On a besoin de beauté.

Et la beauté disparaît dans ce monde-là, chaque jour.

De même, on a sans cesse l'habitude de confondre la vie et le monde.

Le monde c'est du bruit, c'est de l'excitation permanente, c'est de l'envie,

c'est de la peur,

et la vie c'est quelque chose... Un mystère qui pousse, comme une herbe,

c'est quelque chose qui sort, qui nous éveille, qui nous échauffe, qui nous émeut.

Et dans le travail que nous faisons tous ensemble (avec In-Vocazione),

j'ai l'impression de cultiver tout le temps, en moi,

un chant, une musique, qui me permet de m'écarter un peu du bruit du monde,

et de nourrir toujours cette partie-là,

que nourrissent aussi ces tribus aborigènes en Australie,

cette part de beauté qu'on oublie très facilement dans les soucis du monde et du quotidien.

Et l'improvisation permet de nourrir ça à chaque instant.

Parce que dans l'improvisation apparaissent toutes nos peurs, tous nos doutes, tous nos désirs, toutes nos difficultés aussi :

l'imprécision de la voix, un geste qui est tout à coup mal fait...

Mais malgré tout, c'est la recherche permanente de cette beauté.

Et au lieu d'aller s'enfermer dans un temple avec des idées spirituelles,

ou au lieu d'aller chercher des tableaux dans un musée,

c'est la possibilité, à l'instant même, de faire apparaître cette beauté en nous-mêmes.

Qu'elle jaillisse, qu'elle sorte, qu'elle existe.

Et puis après c'est fini.

Mais quelques instants, ça a été possible. Quelque chose a vibré.

Et le silence avant l'improvisation et après l'improvisation n'est jamais le même.

Il y a quelque chose de beaucoup plus dense, dans l'air...

C'est à chaque fois la confrontation avec un mystère."

*Germana Giannini dirige depuis deux ans le groupe In-Vocazione, exploration de la voix, de l'improvisation et du chant traditionnel installé à Séville. Quatorze personnes (italiens, espagnols, français) se retrouvent pour l'accompagner dans cette recherche de « la Vérité dans la voix » qu'elle a commencé il y a plus de vingts ans, en Indes, au Tibet, en Mongolie... Son livre « Le chant de l'autre » vient de paraître en italien et en espagnol. Un DVD paraîtra également dans les mois à venir.

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